
Souvenir des victimes et des héros de la déportation
Discours prononcé le 30 avril 2023
Monsieur le Député,
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs les portes-drapeaux,
Mesdames, Messieurs, chers amis,
En cette journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation, je voudrais que nous nous mettions à la place de ces femmes, ces enfants et ces hommes, ces civils, comme vous et moi, qui ont connu l’une des pires épreuves de toute l’Histoire de l’humanité.
Stigmatisées au quotidien jusqu’à en devenir banal en Europe même bien avant la guerre, ces personnes, qu’elles soient résistantes, juives, tziganes ou encore homosexuelles, ont été arrêtées, parquées et déportées loin de chez elles, de 1941 à 1945.
Transportées dans des trains de marchandises, collées les unes aux autres, sans chauffage, sans hygiène, elles ont traversé des pays pour arriver en Allemagne et être internées dans des camps où ne les attendaient que la souffrance, la torture et, pour plus de 3 millions d’entre elles, la mort.
Jamais, dans toute l’histoire de l’humanité, une barbarie méthodique et mécanique de cette ampleur n’avait été mise en place pour tuer.
La folie d’un homme, qui est parvenue à embrigader toute une nation, a eu pour conséquence plusieurs millions de morts, de blessés et de traumatisés pour le reste de leur vie.
Même si les nazis sont à l’origine de ces meurtres à la chaîne, comment nier aujourd’hui la responsabilité du gouvernement de Vichy qui, en collaborant, envoya plus de 100 000 français vers une mort certaine.
Oui, une partie de la France a collaboré à l’enfer des camps. Certes ce n’est pas toute la France, mais notre devoir envers les innombrables victimes et leurs familles nous impose de le reconnaître et de nous en rappeler.
Parmi ceux qui ont collaboré, ils furent nombreux à dire « nous ne savions pas ». Pourtant, même si le monde entier, dont certains nazis, n’a découvert le véritable enfer des camps qu’en 1945, je ne peux m’empêcher de me demander « Comment pouvaient-ils ignorer ? ».
Comment pouvaient-ils ignorer que ces femmes, ces nourrissons, ces enfants et ces hommes qu’ils entassaient comme des animaux dans leurs wagons n’étaient pas envoyés à la mort ? Comment pouvaient-ils ignorer que, derrière les nombreuses exactions meurtrières commises par les nazis, comme à Oradour sur Glanes, pouvait se cacher pire encore ?
Et surtout : comment en sont-ils venus à trouver en eux une telle absence d’empathie, une telle inhumanité, une telle haine de l’autre qui les a conduits à traiter ainsi leurs pairs ?
Si certains ont collaboré en France, d’autres ont fort heureusement résisté à l’envahisseur allemand, que ce soit dans le sillage du Général de Gaulle ou en protégeant des déportés, à l’instar des quelque 30 000 Justes parmi les nations, dont près de 4 200 en France, qui ont permis de sauver environ 240 000 juifs au péril de leurs vies.
Pour tous ceux qui ont connu et survécu à ces camps, la vie n’a plus jamais été la même. Alors qu’ils ont su jusqu’où l’homme pouvait aller dans l’inhumanité, ils ont, pour beaucoup, su trouver en eux cette force de surmonter cette épreuve, malgré tout ce qu’ils avaient pu endurer, malgré tous ceux qu’ils avaient vu mourir.
Alors que nous célébrerons bientôt les 80 ans de la libération des déportés, leurs témoignages deviennent plus rares et nous avons le devoir d’entretenir leur mémoire et de garder intact leur souvenir dans nos cœurs.
Instruits par cette histoire, nous savons où conduisent les idéologies totalitaires, les fanatismes, les extrémismes, nous en connaissons les prémices et où cela peut nous mener.
Gardons en mémoire cette époque sombre et les exactions qu’elle a connues, alors que la guerre est de nouveau aux portes de l’Europe, que les nationalismes sont exacerbés et que l’antisémitisme ainsi que l’homophobie continuent à prospérer dans nos sociétés.
« Oublier les morts serait les tuer une deuxième fois » a dit fort justement Elie Wiesel. Cela ne rend que plus indispensable notre présence ce matin.
Vive la paix,
Vive la République,
Vive la France !